Qui sont les supporters du Paris FC ?

Antoine Patrelle
6 min readJul 18, 2022

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Si vous êtes madrilène, romain ou encore milanais vous êtes familier avec le fait que votre ville soit partagée entre deux grands clubs professionnels , encore plus si vous êtes londoniens où la ville est partagée entre quatorze clubs professionnels allant de la première à la troisième division, autrement dit vous avez l’embarras du choix. En revanche ,ce concept vous sera plus étrange si vous êtes un supporter français, où les grandes villes sont généralement représentées par un club pro. L’exception étant la capitale, partagée entre le Paris Saint Germain et le Paris Football Club. Deux clubs qui, s’ils ne boxent pas encore dans la même catégorie, partagent une histoire commune et semblent chacun raconter un visage de Paris. Cette cohabitation inédite m’a forcé à me poser des questions : comment le PFC peut exister face à l’ogre médiatique qu’est le PSG ? D’où viennent ses supporters ? Quelle histoire de Paris raconte ce club ? Avant de tenter de répondre à ces questions, un peu d’histoire.

Les liens entre le PSG et le PFC sont si proches qu’il est impossible de raconter l’histoire de l’un sans évoquer l’autre. Le Paris football club naît officiellement en 1969 sous l’impulsion de la FFF ( Fédération française de football ) qui souhaite compter dans ses rangs un club professionnel parisien après l’échec de plusieurs clubs. Cependant le PFC n’est pour le moment qu’un nom, un club fantôme sans équipe ni infrastructure, il doit trouver un club avec qui fusionner. Le choix des dirigeants se portera sur le Stade saint-germanois alors en troisième division et qui change alors son nom en Paris Saint Germain FC. Une fois en première division en seulement deux ans, le club est contraint de retirer la mention Saint Germain du nom du club sous peine de ne plus recevoir de financement de la ville de Paris. Cette contrainte scinde le club en deux, d’autant plus que le Parc des Princes vient d’achever sa reconstruction. La fusion s’achève au bout de deux ans ,avec d’un côté le PFC qui reste en première division ( en fusionnant au passage avec un club de Montreuil) et le PSG qui fait le pari de redescendre en troisième division. Dès lors, la trajectoire des deux clubs va s’inverser, le PSG remontera rapidement en première division tandis que lors de la même année le PFC descend en seconde division. Le PSG devient ainsi aux yeux du public le seul club parisien d’envergure, alors que le PFC , club virtuel créé par la FFF peine à rassembler un public.

Le PFC manque d’histoire et c’est pour cela qu’en 1982 il est racheté par Jean-Luc Lagardère qui le fusionne avec un autre club parisien le Racing Paris qui devient le Racing Paris 1.Le PFC après avoir forcé le PSG à retourner en troisième division subit le même sort et se retrouve en quatrième division avec une équipe de réserve tandis que le Racing reste en seconde division et garde toute la structure professionnelle du club. Dès lors le club naviguera entre la troisième et la quatrième division pendant plusieurs décennies avant de sortir la tête de l’eau en 2015 sous l’impulsion de Pierre Feracci qui apporte au club des infrastructures digne d’un club professionnel.

L’historique complexe du PFC ( à peine effleuré ici ) ainsi que son manque d’encrage géographique sont des facteurs qui expliquent le manque de supporters du club, tout comme l’aspect artificiel de sa création. Néanmoins, depuis quelques années, certains supporters semblent y trouver leur compte.

Un autre Paris

Retour en 2011 , le PSG est racheté à hauteur de 70% par un fond d’investissement venant du Quatar dont la fortune est estimée à 450 milliard de dollars, avec comme objectif la volonté de placer le PSG dans la cour des grands, des très grands. L’accent est mis sur le prestige des joueurs recrutés, de grands noms qui évoquent une histoire du foot et surtout, qui semblaient inaccessibles pour le championnat de France. Le club devient grand, très grand , presque trop pour son propre championnat ou malgré quelques sursauts ( Monaco, Lille) semble parfois à l’étroit en Ligue 1.Le PSG devient un club hors-norme plus soucieux de son image de marque sur la scène européenne ( et même internationale, le club étant notamment de plus en plus populaire aux Etats-Unis ) que sur la scène française. Ce changement de paradigme provoquera aussi une rupture chez certains groupe de supporters historiques du club, insatisfait de la nouvelle organisation du Parc des Princes mise en place en 2010 sous l’impulsion de Robin Leproux. Le stade devient plus sûr, plus familial mais moins enflammé. Le parc ne chavire plus il vogue tel un yacht sur la côte. Enfin la hausse massive des prix des billets finira d’éloigner le club de son public populaire et de renforcer son image de club réservé à une élite autant dans ses rangs que dans ses tribunes.

Pourtant, malgré cette image hors-sol , les supporters du PFC que j’ai pu interroger ne nourrissent pas de haine, ni de rivalité envers le PSG. Certains se félicitent du rayonnement du PSG à l’international mais ne s’y retrouve pas en tant que parisien. Ne serait-ce qu’en terme d’implantation géographique des stades dans la ville, les deux clubs représentent une vision bien distincte de la capitale. Comme l’explique très bien Luca( un des leaders du Ultra Old Clan)lorsqu’il parle du quartier ou se trouve le stade Charléty : c’est un quartier jeune, populaire et surtout accessible via le RER B et l’arrêt Cité universitaire, le métro à Porte d’Italie ou encore le tram. Un contraste flagrant avec le Parc des Princes que Luca illustre en comparant le panorama que les deux stades offrent sur Paris. L’un montre les immeubles haussmanniens du 16éme alors que l’autre offre une vue sur les tours du quartier des Olympiades, célèbre quartier populaire de Paris. Même chose pour le stade d’entrainement du club qui se situe porte de Montreuil, autre quartier populaire de Paris. Le PFC semble ainsi attirer un public jeune et populaire, précisément celui dont le PSG s’est détourné depuis 2011.

Le groupe de supporters Ultra Old Clan

Mais le PFC n’attire pas seulement que des parisiens d’origine amoureux d’un Paris moins touristique, toujours selon les propos de @PassionParisFC , quelques supporters du PFC sont à l’origine déjà supporter d’un autre club en province mais se prennent d’affection pour le PFC, le club de la ville dans laquelle ils vivent. La France étant très centralisée de nombreux habitants de province quittent leur région pour des raisons professionnelles et une fois déraciné, sans remplacer leur club de coeur, le PFC semble plus attirant, plus accessible que le PSG. Ce serait même le cas pour certains supporters de l’OM vivant à Paris, ce qui est la démonstration ultime de la différenciation des deux clubs dans l’imaginaire collectif. Malgré tout et toujours selon ce même supporter, la plus grande problématique de ce type de supporters reste la fidélisation et cela passera par la création d’une histoire commune, notamment une montée en première division qui semble saison après saison de plus en plus proche.

Dans les chiffres cet engouement peine encore à se faire ressentir, le PFC affichant une triste 15éme place au classement des affluences de ligue 2, et les rares fois notamment en Coupe de France où le stade a connu de grosses affluences, des problèmes logistiques liés à la billetterie et à l’organisation ont gâché la fête.

Si il n’existe pas encore de concurrence au niveau sportif entre les deux clubs , ils semblent pourtant se partager une vision de la même ville, un Paris clinquant et facilement exportable à l’international face à un Paris plus populaire, plus accessible mais paradoxalement aussi plus méconnu pour le grand public. L’arrivé récente de Luis Campos au PSG et sa volonté de reconstruire une identité française au PSG permettront peut être au club de faire un pas en direction de ses supporters déçus. En attendant, une place vous attend au stade Charléty.

Remerciements :

Merci aux supporters du PFC qui m’ont aidé pour la rédaction de cet article :

@PassionParisFc sur Twitter

@ParisFC_a_vie sur Twitter

@lesmemesduPFC sur Twitter

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